Vers une loi de programmation pluriannuelle de la recherche

Le 1er février 2019, le Premier ministre avait annoncé la mise en place de groupes de travail afin qu’une loi de programmation pluriannuelle de la recherche soit présentée au Parlement au début 2020, avec un objectif de redonner à la recherche de la visibilité, de la liberté et des moyens.

La concertation s’est organisée autour de 3 thèmes :

  • Comment garantir que les projets scientifiques les plus ambitieux et les plus novateurs pourront être financés comme ils doivent l’être tant en recherche fondamentale que pour répondre aux enjeux sociétaux ?
  • Comment attirer vers les carrières scientifiques les jeunes talents et offrir des parcours scientifiques compétitifs à l’échelle internationale ?
  • Comment développer la recherche partenariale entre public et privé et convertir les résultats de recherche en innovation ?

Intéressons nous au 3ème thème : recherche partenariale et innovation

Dans le rapport, la recherche partenariale se définit comme toute activité dont le résultat est la production de connaissances ou de technologies et l’acquisition d’expertise à travers la collaboration entre acteurs académiques et acteurs privés ou associatifs ou organisations non gouvernementales (recherche collaborative) ou l’achat de prestations de recherche (recherche contractuelle). L’innovation se définit comme toute invention, qu’il s’agisse d’un bien ou d’un service, qui a trouvé un marché, un usage ; donc comme toute invention conduisant à un impact économique, sociétal, environnemental ou venant en appui des politiques publiques. 

Avant d’exposer à grand traits les mesures concrètes qui étayent ces trois champs d’actions, la mission a porté son propre diagnostic sur la recherche partenariale et de l’innovation en France. 

Principales conclusions du diagnostic réalisé

Depuis plus de 15 ans, les gouvernements ont tous reconnu le décalage entre l’excellence scientifique de la recherche française et sa faible contribution aux mondes économique et sociétal. Des politiques publiques très actives se sont succédé pour renforcer la recherche partenariale entre le public et le privé et pour stimuler l’innovation afin d’assurer la compétitivité de la France, comme en témoignent les faits exposés ci-dessous. 

  • En 2016, le soutien public à l’innovation s’élève à 10,5 Md€ (montants décaissés) dont 8,1 Md€ en provenance de l’État, 1,2 Md € des collectivités territoriales et 1,2 Md€ de l’Europe, contre 3,1 Md€ au total en 2006. 
  • Le soutien de l’État a été massif (de 1,8 Md€ en 2006 à 8,1 Md€ en 2016) et s’est traduit par la mise en place de nombreux dispositifs. A lui seul, le Crédit d’impôt recherche (CIR) représente près des deux tiers de l’effort public. Cette créance fiscale est en forte hausse continue depuis la réforme de 2008. 
  • La France est l’un des pays de l’OCDE où le financement public de la R&D privée est le plus élevé (0,42 point de PIB en 2015), en forte croissance depuis 10 ans (0,19 point de PIB en 2005). 
  • Les Régions et l’Europe ont aussi accru leur financement depuis 10 ans. 
  • La présence territoriale a été renforcée avec la création des sociétés d’accélération de transfert de technologie (SATT), les Instituts Carnot, les instituts de recherche technologique (IRT), les pôles de compétitivité, etc… en lien avec l’autonomie des universités. 
  • Une réorganisation institutionnelle majeure a eu lieu autour des années 2010 avec la création du commissariat général à l’investissement (CGI, devenu en 2017 le secrétariat général pour l’investissement, SGPI), de Bpifrance en 2013 et, antérieurement en 2006 de l’agence nationale de la recherche (ANR) qui, à côté des entités existantes, ont eu pour mission de transformer le paysage de la recherche partenariale et de l’innovation. 
  • Plusieurs mesures récentes ont été prises et visent à mieux piloter la politique d’innovation (création du conseil de l’innovation), à soutenir les start-ups deep tech (plan deep tech mis en œuvre par Bpifrance) et à élargir les possibilités pour un chercheur de se consacrer aux activités d’invention et d’innovation (aménagement du dispositif Allègre dans le cadre de la loi PACTE). 
  • Enfin, des grands défis financés par le Fonds pour l’Innovation et l’industrie (FII) ont été lancés sur le modèle des programmes de l’agence américaine de l’innovation de rupture dans le domaine de la défense (DARPA). 

De forts progrès en termes d’utilisation de ces moyens, de la dynamique d’entrepreneuriat ont été constatés et ce, en peu de temps 

  • Les entreprises françaises font moins de R&D que leurs homologues de plusieurs pays (notamment l’Allemagne). Néanmoins, à structure sectorielle comparable à celle de l’OCDE, les entreprises françaises sont plus intensives en R&D que leurs homologues. 
  • Environ 10 000 PME sont intégrées dans les écosystèmes de grands groupes, innovent et font une R&D de bon niveau. 
  • Les équipes d’appui à l’invention et à l’innovation se sont professionnalisées.
  • Les mentalités ont évolué et l’intérêt des chercheurs du public pour le privé et l’entrepreneuriat a fortement progressé par rapport aux générations précédentes. 
  • L’ambition forte pour l’entrepreneuriat portée par le MEF, le MESRI et la BPI a permis la création de start-ups issues des laboratoires publics, en particulier dans le numérique et 
  • Enfin, les collaborations public-privé pour innover se sont développées : la France est ainsi le premier pays européen en part des co-demandes de brevets du secteur académique et des entreprises dans l’ensemble des demandes déposées à l’Office européen des brevets. 

Cependant, le système d’innovation français est peu efficace et ne délivre pas au rythme des transformations du monde 

  • La France ne dispose pas de stratégie d’innovation pour faire face aux grands défis sociétaux 
  • Une gouvernance du système d’innovation qui ne responsabilise pas suffisamment les acteurs 
  • Une organisation des entités de transfert et de valorisation au milieu du gué 
  • Une politique de ressources humaines très en retrait de l’ambition affichée 

Sont proposées des mesures déclinées sur trois champs d’action 

Créer des leaders mondiaux d’origine française fondés sur des découvertes issues de la recherche publique et qui créeront les ruptures de marché de demain 

  1. Définir et mettre en œuvre une stratégie française pour relever les grands défis sociétaux 
  2. Influencer et s’inscrire dans la stratégie européenne d’Horizon Europe 
  3. Créer les conditions pour que davantage de start-ups deep tech émergent et croissent jusqu’au stade d’entreprises de taille intermédiaire 

Augmenter significativement l’ampleur, la profondeur et la continuité des interactions public-privé, public-public et public-société civile

  1. Assurer la montée en puissance de certains dispositifs de recherche partenariale éprouvés 
  2. Développer la recherche expérimentale pour associer les citoyens et les territoires au développement des innovations motivées par les transformations sociétales 
  3. Développer les synergies au niveau régional et favoriser les actions envers les PME 
  4. Mener une politique de formation, d’éducation et de mobilité transformante et reconnaitre la formation par la recherche dans le public comme dans le privé 

À court terme, gagner significativement en simplicité, agilité et vitesse et responsabiliser les acteurs de l’innovation

  1. Constituer une quinzaine de pôles universitaires d’innovation 
  2. Faciliter et reconnaitre les activités de recherche partenariale et d’innovation aux niveaux individuel et collectif 
  3. Rebudgétiser certaines actions du PIA devenues récurrentes 

https://cache.media.enseignementsup-recherche.gouv.fr/file/loi_programmation_pluriannuelle/46/6/RAPPORT_FINAL_GT3_Recherche_partenariale_et_innovation_1178466.pdf

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