Parmi les objets créés par le PIA (programme des investissements d’avenir), les IRT (instituts de recherche technologique) figurent en bonne place. Ils complètent, dans le dispositif français, les Instituts Carnot, les pôles de compétitivités, autres « lieux » de partenariat entre le monde académique et l’entreprise, ainsi que les SATT, CVT et autres incubateurs.
Selon Louis Schweitzer, Commissaire général à l’investissement, ces instituts sont au cœur de la stratégie du PIA, un programme d’investissement guidé par trois thèmes, l’exigence, la vitesse et la simplicité. Il s’exprimait le 21 novembre à Nantes, lors du 2ème forum des IRT.
L’ADN des IRT contient des gènes positifs, au premier rang desquels figure la colocalisation. Elle permet de lancer à pleine vitesse des projets en moins de trois mois, quand il faut plus de deux ans habituellement selon Éric Duceau, directeur scientifique d’Airbus Group Innovations. Selon Gérald Lignon, son président, le meilleur investissement de l’IRT Jules-Verne, c’est la machine à café ! Elle permet des échanges réguliers entre chercheurs et industriels. »
L’accès à l’Europe est presque consubstantiel aux IRT.
Le programme- cadre Horizon 2020 constitue un modèle financier très attractif pour Jean-Marc Delion, délégué général de l’IRT Railenium. Nous devons y aller car l’Europe est l’espace naturel de jeu des IRT, et parce que cela nous donnera un réseau de partenaires et de collaborations. Nous avons un créneau à prendre en mutualisant les ressources pour l’ensemble de nos partenaires » estimant que les universités et les centres de recherche ont du mal à se déplacer suffisamment vite alors que les IRT apportent de la flexibilité. L’Europe permettra d’inscrire notre action dans le long terme, juge-t-il.
Mais que se passera-t-il en 2019, date à laquelle les financements versés aux IRT via le PIA cesseront ? La question (darwinienne ?) mérite d’être posée. Car l’innovation en France, souffre de plusieurs maux, vécus dans les IRT.
En France, qui dit innovation pense innovation technologique, au contraire de la culture anglo-saxonne où la vision est davantage centrée sur l’innovation créatrice et sur l’innovation d’usage. Et qui dit technologie pense propriété intellectuelle. Et la PI est un point de friction entre grands groupes, PME et monde académique (incluant le CEA). Nicolas Orance, président du pôle de compétitivité EMC2 relativisait : Il n’y a qu’en France qu’on parle autant de PI ! Quand on traverse l’Atlantique, la PI, ce n’est pas vraiment un sujet, du moins pas le premier. Ce qui compte, c’est le business. On a l’air malin, avec deux brevets. Si on n’a pas le business, ça ne sert à rien.
Les négociations sur la PI sont souvent longues et ralentissent les travaux. La vitesse dont parlait Louis Schweitzer est mise à mal. D’autant plus qu’il faisait aussi remarquer que on ne peut pas prétendre innover, aider les entreprises de demain, en avançant au pas traditionnel de l’administration. Ce pas est trop lent et l’innovation qui attend perd son statut d’innovation. Il est impossible d’aller vite en faisant compliqué.
La question de la survie à moyen/long terme de l’ensemble des tiges du Mikado est bien une question darwinienne. Seuls survivront les plus évolutifs qui savent rester adaptés à un écosystème d’ES&R&I qui évolue rapidement.
Pourtant, question brevets, les USA paraissent bien placés. Ce n’est peut-être pas la préoccupation première là-bas, mais j’aurais imaginé que cela l’était encore moins en France. Pour autant, en France on a peut-être encore le mythe du concourt Lépine, du brevet qui couvre une invention technologique bien entendu géniale. Il est vrai que c’est une grande satisfaction de trouver une solution à un problème, de crier eurêka et de déposer un brevet. Mais tant qu’on ne transforme pas cela en business on ne vaut pas mieux que Kodak qui a inventé l’appareil photo numérique et n’a rien su en faire. La solution n’est pas le brevet, c’est juste un outil à maîtriser pour protéger, promouvoir et faire fructifier son business.
En fin de compte, il vaut mieux se passer du monde académique et embaucher dans les entreprises, ceux qui ont des idées et envie de réaliser des produits rapidement. Maintenant la lourdeur administrative n’est pas toujours l’apanage du monde académique qui ne s’embarrasse pas de considérations de sécurité pour mettre des hordes d’étudiants sur des bateaux, et pas toujours avec des gilets de sauvetage.
Alors que faut-il faire pour transformer des idées en produits et services en juste le temps qu’il faut pour les développer ?
Exact Michel, la PI inventive doit déboucher sur une valeur ajoutée tangible et calibrée, sur un client si possible global, un modèle d’affaires et un financement adaptés, faute de quoi elle reste dans la poussière, comme 92% des brevets….