Le rapport traité dans le dernier article de ce blog contient une section particulièrement intéressante consacrée à la présentation d’indicateurs d’innovation, absolument nécessaire pour procéder à une comparaison internationale de la force d’innovation des diverses nations.
On utilise à cet effet des indicateurs d’innovation composés d’une multitude d’indicateurs individuels calculés dans chaque pays. Par exemple, l’indicateur d’innovation élaboré par l’Académie allemande des sciences techniques (Acatech) prend en compte de près de 100 indicateurs individuels qui donnent finalement un indicateur unique. En raison de cette complexité, il n’est plus possible de discerner clairement les facteurs déterminants de la force d’innovation.
C‘est pourquoi le KOF, centre de recherches conjoncturelles de l’EPF de Zurich,s’est penché sur la composition des divers indicateurs d’innovation afin de clarifier leur pertinence à l’aide d’un nombre minimal d’indicateurs individuels. Ces indicateurs doivent répondre aux exigences suivantes :
Groupe d’intrants 1 : facteurs technologiques et facteurs améliorant l’efficience
- Moyenne des dépenses de R&D en pourcentage du PIB sur les dix dernières années (2005 à 2015)
- Part des exportations hightech en pourcentage du total des exportations industrielles durant l’année précédente (2015)
- Moyenne de l’intensité de la recherche mesurée en nombre de places de travail (équivalents plein temps) dans la R&D pour un million d’habitants au cours des dix dernières années (2005 à 2015)
- Dépenses de l’État pour la formation en pourcentage du budget total de cet État au cours de l’année précé- dente (2015)
Groupe d’intrants 2 : facteurs financiers de la compétitivité
- Salaire horaire en US$ dans l’industrie manufacturière (2015)
- Frais de création de société en pourcentage du revenu brut par habitant (2015)
- Tarifs douaniers moyens pondérés selon la division économique en pourcentage des frais de douane des produits industriels (2015)
Groupe d’intrants 3 : environnement économique et facteurs d’infrastructure
- Fluidité des opérations commerciales (2014)
- Temps moyen nécessaire pour exécuter légalement des contrats (2016)
- Productivité de la logistique, notée de 1 à 5 (de la plus faible à la meilleure) (2015)
- Contraintes de la procédure douanière, notée de 1 à 7 (de la plus forte à la plus faible) (2015)
- Utilisation d’internet en pourcentage de la population (2015)
Groupe d’extrants: indicateurs mesurant la perfor- mance économique d’un pays
- PIB par habitant en parité de pouvoir d’achat (PPA) USD constante (2016)
- Productivité du travail en PPA USD constante (2012)
- Solde de la balance courante en pourcentage du PIB (2016)
- Croissance annuelle moyenne du volume des exportations au cours des 15 dernières années (2000 à 2016)
Ces critères sont ensuite utilisés pour comparer la force d’innovation entre les deux champions de l’innovation que sont la Suisse et Singapour (en haut) et entre la Suisse et la Chine, le pays aux plus bas salaires (en bas).
Le nombre restreint d’indicateurs individuels permet de procéder à une comparaison qualitative de la force d’innovation des pays au moyen d’illustrations graphiques simples dont les diagrammes en toile d’araignée (radar plot) sont les plus adéquats.
Trois différences apparaissent entre les champions de l’innovation que sont la Suisse et Singapour : les salaires horaires sont nettement plus élevés en Suisse qu’à Singapour, la croissance du volume des exportations est beaucoup plus faible en Suisse et alors que Singapour présente une plus grande densité de chercheurs, les dé- penses consacrées à la R&D sont plus élevées en Suisse. Il est préoccupant que la Suisse soit moins bien classée que Singapour dans cinq autres domaines : la productivité du travail, la productivité de la logistique et les dépenses de l’état dans la formation sont plus basses, alors que les contraintes de la procédure douanière et le temps d’exécution des contrats sont plus élevés. En comparaison avec la Chine, désignée souvent comme «la sous-traitante» des pays industrialisés occidentaux, la Suisse l’emporte dans presque tous les domaines. La Chine ne fait mieux qu’en matière de salaire horaire et de croissance des exportations.