L’« innovation » est vraiment le sésame des stratégies étatiques, en agriculture, en santé ou s’agissant des grands investissements… alors que la SNRI de 2009 est devenu la SNR en 2015, laissant tomber le I(nnovation) (comprenne qui pourra). Et maintenant dans le domaine de la Défense.
C’est ce que nous apprend la Revue stratégique de défense et de sécurité nationale qui vient d’être rendue publique.
Avant de traiter de la partie « innovation » de cette « revue stratégique », qu’il me soit permis deux remarques.
Emmanuel Macron est un homme qui a compris qu’il doit agir vite en début de mandat afin que les effets de ses nécessaires décisions portent leur fruit aussi vite que possible parce que la France en a besoin mais aussi, si possible, avant la fin du quinquennat. Et qu’il est nécessaire de rassurer les « troupes » du Ministère des Armées après le clash avec le Général de Villiers. C’est donc, pour aller vite, une « simple » Revue Stratégique et non un Livre Blanc (après ceux de 1972, 1994, 2008 et 2013).
Ensuite, s’agissant des grandes missions des armées, le résumé (3 pages) de ce document précise que les armées françaises devront être en mesure d’agir de façon autonome dans les domaines de la dissuasion nucléaire, de la protection du territoire et de ses approches, du renseignement, du commandement des opérations, des opérations spéciales et dans l’espace numérique. Dans les autres domaines, les partenariats et coopérations amplifieront les capacités d’action de nos forces. Parmi ces autres domaines, figure donc… la projection de forces. Ayant noté l’importance de « la tête » (renseignement, commandement, numérique) et de la protection (cf Sentinelle), et eu égard aux moyens budgétaires disponibles, le choix entre dissuasion et projection est clair et présent dans la préface du Président de la République : j’ai décidé le maintien de notre stratégie de dissuasion nucléaire et le renouvellement de ses deux composantes : elles sont la garantie ultime de nos intérêts vitaux, de notre indépendance et, plus largement, de notre liberté de décision. Il semblerait donc que la projection à l’extérieur se fera en coalition et en partenariat, y compris en Afrique.
S’agissant de l’innovation, dans le résumé de cette Revue stratégique, l’innovation est présentée comme au cœur de la démarche du ministère et des armées : Accompagner l’innovation et la révolution numérique doit également conduire à décloisonner davantage les domaines civil et militaire et introduire plus d’agilité : celle-ci doit influencer la conception et la conduite des opérations d’armement mais aussi, au-delà de la dimension technologique, inspirer de nouvelles relations entre le monde de la défense et l’ensemble des domaines de la recherche, pour renforcer les capacités de prospective et d’analyse, nourrir la réflexion stratégique et doctrinale et accroître notre agilité opérationnelle.
Plus largement, cet esprit d’innovation doit irriguer tout le ministère, son organisation, ses méthodes de travail, pour en faire évoluer la culture et accepter la part de risque dont il est indissociable. Le recrutement et la fidélisation des talents et des compétences, sur lesquels repose l’ensemble de l’écosystème de défense, constituent un enjeu majeur de cette transformation.
Le rapport complet est, quant à lui, organisé en 3 parties :
- Un contexte stratégique en dégradation rapide et durable
- De nouvelles formes de guerre et de conflictualité
- Notre stratégie de défense : autonomie stratégique et ambition européenne
C’est évidemment dans cette dernière partie que les questions d’innovation sont traitées, notamment dans le chapitre 3. Une ambition industrielle et technologique réaffirmée qui comporte 3 paragraphes :
3 1 La nécessité d’une BITD forte
3 2 Des coopérations technologiques et industrielles maîtrisées
3 3 La préparation de l’avenir et l’intégration de l’innovation et du numérique
S’y trouve en particulier une discussion sur les quatre approches possibles en matière de coopérations envisageables concernant les modalités de réalisation des systèmes de défense :
- la souveraineté qui relève d’une approche nationale, non partageable …
- la coopération avec maintien des compétences en France concerne les matériels pour lesquels un partage peut être envisagé …
- la coopération avec dépendance mutuelle …
- le recours au marché …
Une planche explicite les cas possibles selon les domaines.
S’agissant des axes de travail pour les partenariats académiques-économiques, le document précise des points intéressants.
Il appelle de ses vœux l’augmentation du niveau des ressources budgétaires dédiées à la S&T (science, recherche, technologie et innovation).
Il note que cet effort financier permettra de continuer à investir dans les technologies les plus longues et coûteuses à maîtriser, spécifiques au domaine de la défense (hypervélocité, amélioration et fusion des senseurs, furtivité active…) Il rendra également possible une démarche exploratoire accrue dans les domaines technologiques porteurs de ruptures et issus du domaine civil (intelligence artificielle, robotique et autonomie décisionnelle, mise en réseau des systèmes, nouveaux matériaux, biotechnologies…) Des démonstrateurs d’envergure permettront de mieux préparer la prochaine génération de systèmes et d’équipements …
Selon les travaux de cette Revue stratégique, cette démarche d’agilité inclut la construction de partenariats et la fluidification des échanges, y compris en termes de ressources humaines, au sein d’un écosystème élargi impliquant des acteurs civils et militaires, étatiques, universitaires, entrepreneuriaux et industriels tout en notant que la compatibilité de cet objectif avec les contraintes de déontologie doit faire l’objet d’une attention particulière.
Enfin, il insiste sur le fait que la France devra continuer à proposer une offre de formation au meilleur niveau afin de rester attractive et de préparer les futures générations aux défis à relever en matière de sécurité et de défense.
Résumé de la Revue: https://www.defense.gouv.fr/content/download/514657/8664372/file/Revue+stratégique+de+défense+et+de+sécurité+nationale+2017+-+Synthèse.pdf
Pour mémoire :
Agriculture et innovation :
http://science-innovation-developpement.com/agriculture-recherche-et-innovation/
http://agriculture.gouv.fr/sites/minagri/files/rapport-agriculture-innovation2025.pdf
Santé et innovation :
http://science-innovation-developpement.com/strategie-nationale-de-sante-linnovation-prioritaire/
http://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/dossier_de_presse_sns2017_18092017.docx.pdf
Grand Plan d’Investissement :
http://science-innovation-developpement.com/xxx/
http://www.gouvernement.fr/partage/9535-rapport-de-m-jean-pisani-ferry