Le crédit impôt recherche (CIR) est parfois décrié et génère des positions passionnées. Preuve en est le rejet au printemps dernier du projet de rapport final des travaux de la commission d’enquête sénatoriale « sur la réalité du détournement du crédit d’impôt recherche de son objet et de ses incidences sur la situation de l’emploi et de la recherche dans notre pays » (sic), voire http://science-innovation-developpement.com/actualites-du-cir-senatoriales-mais-pas-que/ .
L’ANRT (Agence nationale de la recherche et de la technologie) vient de diffuser son étude annuelle sur le coût moyen d’un chercheur en France d’où il ressort que le CIR s’acquitte correctement de son rôle de soutien à la recherche des entreprises en France et de renforcement de l’attractivité du site France. Toutefois, l’avantage apporté par le CIR tend à s’éroder (15% de moins en 5 ans seulement). Cette étude souligne que, hors Etats-Unis, sans le CIR, le coût du chercheur en entreprise en France serait le plus élevé du monde.
Le cours mondial du coût du chercheur d’entreprise devient une réalité.
L’étude repose sur les coûts de revient comparés des chercheurs de 15 groupes internationaux, membres de l’ANRT, qui effectuent une partie de leur recherche en France et qui investissent 14 Md€ en recherche dans le monde (plus de 30 pays), s’appuyant près de 74 000 chercheurs, dans une grande variété de secteurs d’application.
Ces groupes ont des équipes de R&D dans plus de 30 pays et maintiennent pourtant plus de la moitié de leurs effectifs en France ! Si la moitié de leur recherche est faite en France, c’est pour des raisons qui n’ont pas toutes à voir avec l’habitude ou le patriotisme. L’explication est simple et tient en un mot : compétitivité (coût et hors coût) souligne cette étude.
Dans cette étude, le cours du chercheur est exprimé en indice. La valeur 100 correspond au coût moyen du chercheur français sans CIR ni subvention. Prenant en compte le CIR et les subventions locales, le cours moyen du chercheur en France s’établit à 74, ce qui est mondialement compétitif.
Les Etats-Unis (à 122), le plus cher du panel des pays considérés, et l’Inde (à 39), aux plus bas coûts, bordent le cours du chercheur d’entreprise dans le monde. Comme le remarque l’étude, ces deux pays mènent des politiques différentes de celles de l’ensemble des autres pays. 50% plus chers que le reste des pays développés, les Etats-Unis semblent tenus à des rémunérations élevées pour capter les talents. (…) Symétriquement, l’Inde, 50% moins chère que le cours mondial du chercheur n’a pas encore trouvé les recettes de progrès de son voisin chinois et reste avant tout un pays à bas coûts.
L’ANRT parle de mercato mondial de la recherche en notant que Italie, France et Singapour ont des prix environ 10% moins chers que 6 autres contributeurs importants du socle de la recherche mondiale Japon, Allemagne, Royaume-Uni, Canada, Pays-Bas et Belgique. Elle estime que la France de la recherche reste, grâce au CIR, bien placée à l’échelle mondiale tout en notant que les mini-réformes annuelles du CIR ont cependant érodé l’avantage compétitif du dispositif.
Mais l’étude estime que l’attractivité du territoire national est fragile. Les pointages réalisés auprès de plusieurs des grands employeurs de chercheurs du panel ANRT permettent d’affirmer que c’est le maintien de la compétitivité par les coûts de la recherche qui garantit une évolution favorable des effectifs de recherche sur le territoire national. Une preuve étant la baisse de la part des effectifs de certains pays pour lesquels le coût du chercheur a augmenté (par exemple, Royaume-Uni).
L’ANRT enfonce le clou en affirmant que le coût du chercheur est un élément déterminant pour les décideurs centraux de maintenir une activité de recherche dans une zone géographique donnée (Europe, Asie, Amérique du Nord, Amérique du Sud), étant donné que les équipes de recherche localisées en France sont de fait en compétition interne avec toutes les autres équipes localisées ailleurs.
L’étude conclut logiquement que sans le CIR, l’attractivité se déprécierait. La France serait, hors Etats-Unis, le pays le plus cher du monde.
Remarquons que les 15 entreprises du panel ANRT 2015 entretiennent 119 sites de R&D sur le territoire et donc diffusent plus (rouge) ou moins (vert) intensément leurs effets dans les écosystèmes de recherche et d’innovation.
Sur l’ANRT :
http://www.anrt.asso.fr
L’étude :
http://www.anrt.asso.fr/fr/espace_europe/pdf/cout-chercheur-panel-anrt-cir-2015.pdf
Sur le CIR :
Il faut savoir que l’état paie les 2/3 du salaire d’un chercheur par le CIR.
Démonstration :
– un chercheur touche un salaire brut chargé de 100
– avec les fonctionnements de 50 % forfaitaires, il compte dans l’assiette du CIR pour 150
– le CIR obtenu est donc de 150 x 30 % = 45
– mais il faut tenir compte du fait que les 45 de CIR ne sont pas imposable et que les 100 de coût sont déductible, si l’on veut comparer les deux montants « nets d’impôt », il faut donc comparer les 45 du CIR et les 67 de coûts après impôt (100 – 33 % d’impôt IS)
donc CIR/Coût du Chercheur = 45/67 = 0,67, soit les 2/3 de son coût !
Je pense qu’avec ce raisonnement, le coût du chercheur français baisserait encore dans l’échelle présentée !
Ivan Behaghel
06 82 04 77 90
A méditer et à généraliser : il convient de développer la compétitivité des entreprises pour que les fruits de la recherche produisent un retour sur l’investissement fiscal que représente le CIR.